La Demeure de Tinùviel

[Tinùviel]

La demeure que Tinùviel avait occupée avec sa mère adoptive, avant que cette dernière ne décéde et ne la légue à la jeune femme était une grande maison aux airs de manoir, entourée d'une roseraie où était plantées toutes les variétés possibles et imaginables de ces fleurs - de la rose rose commune, à la rose noire très rare.
Tinùviel poussa la porte du grand portail de fer délimitant la propriété.

- Je vous présent ma demeure ou, du moins, celle que ma mère adoptive m'a léguée à sa mort. Qu'en pensez-vous ? demanda la jeune femme.

Elle se pencha, cueillit une rose noire dans un parterre et attendit que l'homme réponde.

[Zodiac]

"Toutes ces roses.. Si ma nièce Shany voyait ça.. C'est une grande amoureuse des fleurs.."

Amok saisit la rose de Tinùviel et la sentit.. Elle avait une légère effluve de poussière et de miel, sans doute une abeille qui s'était posé dessus il y a peu.. C'était intéressant.. Il pensa enfin à relever la tête pour admirer le manoir.. Il était grand.. En comparaison, la maison de Shany était une toute petite maison.. Cependant il y avait quelque chose de troublant dans ses façons.. Il avait l'impression qu'elle l'attirait dans une toile d'araignée géante.. C'était fort probable.. Il l'aurait lui-même fais si cela avait pu lui procurer un cobaye..

"Intéressant.. Et vous faites la faveur de cueillir une rose pour chacun de vos clients ? Charmante attention.. Cependant dois-je prendre en considération la couleur de la fleur ?"

[Tinùviel]

- Vous vous méfiez de moi... mais je peux vous promettre que je ne vous veux aucun mal d'aucune sorte. Vous êtes bien le premier de mes clients qui se méfit autant de moi... Me prendriez-vous pour une sorte de Veuve Noire, monsieur ? De plus, je ne cueille générallement pas les roses de mon jardin pour les offrirent à mes clients, plutôt pour des personnes que j'apprécie vraiment ou bien que je haïe, ce qui est rare me concernant, puisque je n'ais pas pour habitude de lier des amitiés. Vous avez une niéce qui affectionne particuliérement les fleurs ? Il me plairait de pouvoir la rencontrer un jour, nous pourrions parler des roses... Et échanger nos opinions sur leurs parfums ou autres...

Tinùviel s'intérompit pour reprendre son souffle, puis reprit :

- La couleur de la fleur n'a aucune importence, en ce qui vous conserne, monsieur. Et si jamais cela avait été le cas et que j'avais eu l'intenssion de vous faire du mal, je ne vous aurait pas offert une rose noire... pour moi, le noir représente les ténèbres, mais la couleur de la mort, selon moi, est le blanc. Le rouge est le simbole de la passion charnelle, tandis que le rose est celui de l'amour. Mais ce ne sont que mes opinions, vous pouvez tout à fait ne pas être d'accord, monsieur.

[Zodiac]

"Croyez-moi.. J'ai connu des personnes qui m'ont été fidèles pendant des années, de l'époque où j'étais inquisiteur, j'avais avec moi plusieurs compagnons pour traquer et éradiquer le mal.. Notre travail n'étant pas des plus simples il était normal que l'on ai souvent des pertes et que l'on ne se connaissait pas tous comme des vais amis.. Mais il y a des chanceux comme moi qui sont dotés d'assez d'audace et de talent pour survivre.. Et ceux-là j'ai pu m'y attacher.. J'ai usé de mon corps comme d'un bouclier pour les sauver à maintes reprise.. Et devinez le plus beau dans cette histoire ? J'ai été poignardé au sens figuré.. Dès que j'ai quitté mes ordres, on m'a immédiatement déclaré comme étant hérétique en plus d'être déserteur.. Alors que peut représenter une personne rencontré il y a tout juste une demi-heure comme danger comparé à des gens que je considérait comme mes amis qui aurait été capables de me faire monter sur un bûcher ?"

Le vieillard gonfla ses poumons et soupira longuement.. Le voilà qui devenait sénile au point de radoter ses vieilles histoires.. Amok craqua sa nuque et chercha un moyen pour adoucir l'atmosphère.. Vite.. Une blague ? Oh.. Pourquoi pas..

"Dans ce cas.. J'espère que ce sera gratuit.. Et que j'aurais une rose rouge avec ça.. Ah.. Excusez l'humour.. Enfin.. Humour.. Avec un soupçon de vérité.."

Il sourit..

[Tinùviel]

- Je suis désolée que vos anciens amis aient nourris ces intentions envres vous, sincérement, même si je ne puis rien y changer... Et je comprends que vous soyiez méfiant à mon égard, mais je puis vous garantir que je ne suis pas une menteuse. Certaines belles jeunes femmes se servent de leur beauté pour attirer leurs "proies", mais ce n'est en aucune façon mon cas.

Tinùviel reprit son souffle et continua en souriant :

- Mais si cela peut vous faire plaisir, je puis faire une exception avec vous... cela ne me tuera pas. Et je puis également vous donner une rose rouge... Si vous me permettez ces termes, je vous aime bien, monsieur. Je n'ais pas pour habitude de dire à des gens que je les apprécie. Mais vous n'êtes pas comme toutes ces bonnes gens qui méprisent ouvertement les jeunes femmes de mon métier, alors qu'ils sont bien heureux de les retrouver le soir. Et votre physique n'a rien à voir là-dedans. C'est votre façon de penser... elle n'est pas celle de tous ces malotrus. Je me doute que vous avez beaucoup vécu et vu de choses, mais vous avez aussi beaucoup souffert... Et si jamais il m'était possible de changer cela, même juste un moment, ce serrai avec grand plaisir que je vous aiderai, monsieur. Sincérement.

La jeune femme regarda l'homme avec une lueur de profonde sympatie, persque de tendresse, dans les yeux et sourit, attendant qu'il réponde.

[Zodiac]

Amok laissa tomber la rose.. Un éclair le frappa.. Il ignorait ce que c'était exactement.. Ce n'était pas une crise cardiaque, sa mort n'était prévue que dans quelques mois.. Ce n'était pas non plus une indigestions, les navets qu'il avait mangé étaient frais de la semaine dernière.. Sa face presque haineuse laissa place à un air ahuri, presque choqué, mais plutôt surpris.. Le vieillard reprit ses esprits paisiblement..

"Oh.. J'ai subi mais j'ai aussi fais subir, au fond j'ai été un homme.. D'ailleurs, savez-vous pourquoi la plupart des gens traitent les femmes de votre condition avec une si grande bassesse.. C'est simplement parce qu'ils savent qu'il cèdent au vice et que votre image leur projettent leur propre honte.. C'est exactement comme les légendes, certaines sont nées pour créer et répandre l'horreur, il est simple de dire que ces légendes sont là pour adoucir leur propre monstruosité.. Dès que vous trouvez pire ailleurs, vous avez l'impression que vous êtes passable à coté.. Mais vous me rassurez puisque vous n'êtes pas du genre à trahir.."

Le vieillard frissonna.. Visiblement il avait froid..

"Oh.. Par tous les dieux.. Vieillesse ennemie qui me rend fragile.. Bon sang.."

[Tinùviel]

- Oh, je suis distraîte... Cela fait un petit moment que nous parlons dans le froid... Veuillez m'excuser, je n'y prends plus garde à force de passer mon temps dehors pour trouver des clients... Venez vous mettre au chaud. Je ne sais pourquoi, mais je sens que cette soirée et cette nuit vont êtres particuliérements glaciales comparer au doux automne que nous avons... D'ailleurs l'hiver n'est pas encore là, c'est étrange...

Tinùviel prit la main de l'homme et le conduisit jusqu'au perront, puis ouvrit la porte avec une vieille clé dissimulée dans son décoleté.

- Excusez le désordre, je ne suis pas très organisée... Et une piétre bricoleuse...

La jeune femme conduisit le vieil homme à travers un vestibule où les tableaux acrochés aux murs étaient un peu de travers, la peinture écaillée par endroits et certains meubles légèrement bancals. Puis elle le fit passer dans un salon, le fit assoir sur un cannapé de velours rouge, sortit deux verres et un bouteille d'alcool.

- Hum... Pardonnez-moi, est-ce que vous buvez ? Personnellement, je bois de temps en temps.

[Zodiac]

Amok écarquilla les yeux à mesure qu'ils avançaient dans ce manoir privé d'attentions en matière d'entretien.. Pourtant la poussière semblait absente.. Bah, l'important c'était la douceur du velours de ce bon canapé.. Il tapota doucement le tissu et ses yeux s'élargirent.. De l'alcool.. Voilà des décennies qu'il n'en avait pas ingurgité.. Il s'agissait d'un poison, tout le monde est d'accord à ce propos.. Mais imaginez votre système faisant une intolérance à ce liquide doux ? C'était précisément ce qui fit répondre Amok de la façon suivante..

"Excusez-moi.. Je.. Auriez-vous du thé à la place ? Non pas que je me refuse à vous accompagner mais.. Enfin.. Juste que.. Je ne peux pas boire, ce serait mauvais pour mon cœur.."

Le vieillard croisa ses doigts et les porta à son menton pour soutenir sa tête.. Ses yeux plongèrent dans ceux de Tinùviel..

"Vous n'êtes pas humaine complétement je me trompe ? Je perçois sur vous des effluves qui me semblent légèrement différentes.. Et je ne pense pas que ce soit l'odeur d'un précédent client.."

[Tinùviel]

Tinùviel fronça légèrement les sourcils, mais sourit également, ce qui devait lui donner un air assez étrange...

- Oui, bien sûr, je comprends, vous voulez éviter d'avoir plus de problémes avec votre coeur... Quel thé voulez-vous, j'en ai une assez grande collection. Et en effet, je ne suis pas totalement humaine, mais... comment savez-vous ?

Avant que le vieil homme ne réponde, la jeune femme alla chercher une grande boite d'acajoux possédant plusieurs tirroires, la posa devant lui et le laissa répondre et choisir le thé qu'il prendrait.

[Zodiac]

Le vieillard sourit à son tour.. Il chercha patiemment un thé à son goût en laissant durer le suspens de sa petite technique secrète.. Soudainement, il pinça un sachet de thé à la muscade et le tendit à la jeune femme avec un petit mouvement coulant du poignet..

"L'odeur.. J'ai la chance d'avoir retrouvé les sens dont nos ancêtres, humains pour le moins, possédaient.. Simplement que nos dégageons tous des odeurs si infimes soient-elles.. Et la votre m'a laissé perplexe.. Ca ressemble à une promenade en forêt.."

Amok sourit paisiblement et s'adossa au canapé..

"Et autant vous dire que cette sensation de senteurs sylvestres me plait particulièrement.. Un peu comme une oasis de nature dans un désert de pollution humaine.."

[Tinùviel]

Tinùviel sourit encore.

- Eh bien, vous êtes tout près de la vérité, monsieur. Pour vous, à quelles créatures fait référence la forêt ?

Elle prit le sachet de thé, sortit une tasse de porcelaine avec soucoupe et cuiller assorties d'un placard, mit le sachet dans la tasse qu'elle posa sur la table basse, puis partit dans la cuisine faire bouillir de l'eau, laissant ainsi le temps au vieil homme de réfléchir sur sa partie hybride qu'il ne connaissait pas.

Pendant que l'eau chauffait, la jeune femme regarda par la grande fenêtre de la cuisine et son regard se perdit sur la forêt de roses qui entourait le manoir et celle d'arbre, au loin, sur lesquelles la nuit tombait, innéluctablement. Un jour de plus qui mourrait, pour laisser place à un autre qui naîtrai aux aurores. Elle n'aimait pas repenser à ces souvenirs-là, ils lui faisaient très mal. Ils la faisaient souffrir car ses parents l'avaient abandonnée, eux qui auraient, au contraire, dû l'aimer plus que tout au monde. C'est ce qui l'avait conduit, au final, à cette vie de déboche et elle était tellement déboussolée à présent, par rapport à cela qu'elle ne savait plus quoi faire ni que penser.

Le bruit de la théiére sifflant, la fit sortir de ses pensées et elle prit cette dernière pour la rapporter au salon.

Elle versa l'eau bouillante sur le sachet de thé, puis demanda au vieil homme :

- Avez-vous trouvez de quelle autre espéce je suis issue, monsieur ?

[Zodiac]

Amok avait repensé aux tableaux de sa mère.. Il y en avait un en particulier qui lui rappelait beaucoup le regard de la jeune femme.. C'était une belle pièce, les tons verts dominaient, seul le contraste de la peau blanche troublait ainsi cette beauté sylvestre.. Son nom ? Il devait absolument s'en souvenir..

"Nymphe !" S'était-il écrié dans le salon..

Confus, il baissa la tête et se frotta la nuque.. Une question le turlupina, mais.. C'était indigne de lui.. Oh.. Pourquoi pas après tout.. Il se décida..

"On peut dire que.. Votre race conditionne en partie votre tempérament ? Vous êtes une nymphe et une fille de joie, j'imagine que vous êtes.. Bah.. Excusez-moi c'est la fatigue.."

[Tinùviel]

Tinùviel sourit de plus belle, elle n'aurait su expliquer ce qu'elle ressentait vraiment, mais elle appréciait vraiment beaucoup cet homme ; ce qui n'était pas habituel venant d'elle.

- Vous avez raison, je suis à moitié nymphe. Mais les rapports entre mes parents et moi sont assez compliqués...

La jeune femme détourna le regard, gênée et légèrement angoissée : elle n'avait jamais parlé à personne de ce qui l'avait conduit à être enfant des rues pendant si longtemps, même à sa mère adoptive. Mais elle sentait qu'elle pouvait avoir confiance en ce vieil homme, même s'ils ne s'étaient rencontrés que depuis peu. Elle éprouvait le besoin de lui faire confiance, mais n'aurait pas su dire pourquoi.

- Je ne me suis jamais penchée sur la question du fait de ma nature par rapport à mon comportement... mais que voulez-vous dire ? Qu'imaginez-vous me consernant, monsieur ?

[Zodiac]

Amok lui aussi souriait de plus en plus.. Il souffla sur sa tasse et bu une gorgée.. C'était brulant.. Pas autant que l'atmosphère mais quand même..

"Allons.. Croyez-vous que le sort des autres soit différent ? On appelle ça les secrets de famille n'est-ce pas ? Vous avez de drôles de rapports avec vos parents ? Moi.. Je n'ai quasiment jamais vu ma mère.. Quant à mon père.. Jamais.. Il est mort le même jour que ma mère a accouché de moi.. On m'a donné le prénom d'Amok en la mémoire de son acte héroïque.. Quant à ma mère.. Elle était ambassadrice, croyez-vous que son travail lui permettait de rester et s'occuper de deux enfants ? Non.. Alors ne vous inquiétez pas à vous morfondre quant à vos problèmes familiaux.."

Le vieillard pouffa en mettant son poing devant sa bouche.. Gêné..

"Seriez-vous du genre Nymphomane ?"

[Tinùviel]

Tinùviel glouça quand Amok lui demanda si elle était du genre nymphomane.

- En même temps Amok - si vous me permettez de vous appelez par votre prénom - cela fait en quelque sorte partie de mon métier... Hum... si je puis me permettre de vous demander cela : quelle est la signification de votre prénom ?

La jeune femme rougie, essaya de se reprendre et balbutia confusément :

- Non, excusez-moi... cela ne me regarde pas... La curiosité est un très vilain défaut. Pardonnez-moi.

Elle ne comprenait pas pourquoi elle se sentait si gênée, elle avait pourtant eu l'habitude de dire ce qu'elle pensait, que cela plaise ou non aux personnes consernées. Elle ressentait un étrange sentiment. Après tout ce temps à faire ce métier sans jamais rien éprouver pour ses clients, était-il possible qu'elle soit en train de désirer Amok ? Un côté de son être se rebellait, lui hurlant qu'Amok était un vieil homme, qu'il mourrait sans doute bientôt, qu'elle ne pouvait pas tomber amoureuse de lui. Mais de l'autre la sympatie, peut-être même l'amour qu'elle éprouvait pour lui, lui disait de tanter sa chance.

Elle était déboussolée par cette bataille intérieure que se livraient les deux parties d'elle-même. Elle s'assied donc à côté du vieil homme , sur le canapé de velours rouge, posa une main sur la cuisse d'Amok, se pencha un peu vers lui et lui dit avec un sourire rayonant :

- Ne devions-nous pas faire quelque chose, tous les deux ?

[Zodiac]

Amok but une gorgée.. Son prénom était synonyme de fierté, il ne pouvait s'empêcher de prendre un ton pour le moins prétentieux lorsqu'il répondit..

"Amok ? Ah.. Il faut connaître l'histoire.. Mon père, Rogvirr Pravian était général au service d'un grand royaume.. Le hasard choisissant bien sa cible, mon noble père fut réduit à défendre un avant-poste face à une armée supérieure en nombre.. Mais il tint tête, lui et ses soldats.. Même en sachant qu’il allait perdre, il décida de tenir tête à l’ennemi avec sa compagnie pour gagner du temps et que le reste de l’armée puisse arriver à temps, il est mort en héros.. Un Amok, c'est l'acte par lequel quelqu'un décide de mourir en emportant un maximum de gens avec soi.. Cela satisfait-il votre appétit en matière de curiosité ? J'ai toujours eu pour principe que l'on est mieux dans sa tête en sachant toujours se débrouiller, pour ça, il faut des connaissances.. Oh oui.."

Le vieillard se tut.. Et regarda Tinùviel s'approcher de lui.. Frôlant de s'étouffer lorsqu'elle posa sa main sur sa cuisse.. Mon dieu.. Que se passait-il donc ? Un réflexe humain étouffé depuis des décennies se réveilla soudain, ses yeux fixèrent en l'espace d'un clin d'oeil le décolleté de la jeune femme, d'un autre coté, elle se courbait, lui offrant la vue.. Le calme impérieux du sage néanmoins fut de rigueur.. Il fallait comprendre ce qui se passait exactement.. Non.. Plutôt.. Changer de sujet.. Il ne sut que dire..

"Vous n'avez pas touché à votre verre.. Vous n'avez pas soif ?"

[nobodies]

La nuit était entièrement tombée à présent sur Clantor, drapant la cité d'obscurité et de ténèbres. Pour certains il était l'heure d'aller se coucher, pour d'autres la vie commençaient tout juste. D'autres encore devaient accomplir de sales besognes et quelques esprits naïfs et facilement impressionnables voyaient dans cette atmosphère leurs peurs cachées, enfouies en eux-mêmes et qu'ils n'oseraient jamais avouer...

Amok, après avoir posé sa question à Tinùviel, vit un mouvement furtif par la fenêtre qui lui faisait face. Avec son ouïe surhumaine, il avait entendu les frottements caractéristiques de pattes d'insectes... Comme ceux qu'il avait autrefois... Restant maitre de lui, il fit comme si de rien n'était. Peut-être, avec un peu de chance, que sa compagne n'avait rien remarqué... Dans tout les cas, lui il l'avait remarqué, et il savait ce que signifiait ceci:

Salias s'impatientait...

[Tinùviel]

- Amok, je ressens quelque chose de très étrange pour vous... Je ne saurais pas le décrire... Mais je pense que si je bois ne serrait-ce qu'un verre d'alcool, même s'il n'est pas très fort, je vais me montrer encore plus entreprenante. Ce qui, je pense, risque de vous destabiliser... Or, je veux rester maîtresse de mes actes et de mes paroles.

La jeune femme détourna les yeux vers la fenêtre en face d'eux.

- Je risquerai de dire des choses qui pourrai vous surprendre, voir vous choquer...

Tinùviel retira sa main.

- Je présume que si vous changez de sujet, c'est que vous ne voulez pas passer la soirée avec moi de la façon que je vous avais proposer... cela ne fait rien... je... nous pouvons continuer à parler...

Elle se leva et alla s'assoir dans un fauteuil du même velours que le canapé, en face d'Amok, tournant le dos à la fenêtre et aux ténèbres qui entouraient le manoir.

[Zodiac]

Amok sinistrement assombri par un signe au travers de la fenêtre n'entendit qu'a demi-mot la réplique de Tinùviel.. Mais il capta l'essentiel.. C'était le principal.. Il s'était un jour promis de ne plus laisser ses sentiments prendre le dessus par rapport à ses devoirs.. Et il avait malheureusement quelque chose de prévu.. Il ne savait pas pourquoi il avait dévié de sa route.. Au fond de lui, il savait.. Elle lui ressemblait tant..

"Je.. Je crois que je suis de trop.. Et vous êtes sans doute encore en train de douter.. Je reviendrais demain soir à la même heure.. Si vous avez réfléchi et que vous êtes sûr de ce que vous avancez, alors allumez une bougie à votre fenêtre.."

Le vieillard croisa les doigts et se redressa, prenant un air presque solennel..

"N'imaginez pas des choses.. Vous vous heurtez seulement à l'iceberg sans en avoir aperçu ni le fond ni encore moins la glaciale étreinte qui vous rapproche du tombeau à mesure que vous vous approchez.."

Il se leva, s'inclina légèrement et s'en alla, sans ajouter quoi que ce soit.. Plus tard, il s'invita à descendre dans les entrailles de la ville.. Là où son travail allait enfin prendre une tournure pour le moins.. Intéressante..

[Tinùviel]

Tinùviel resta assise un long moment, après qu'Amok fut parti, ses dernières paroles résonnant encore à ses oreilles. Elles semblaient contenir un message caché.

# Voulait-il dire qu'il est dangereux ? Que je ferrai mieux de... de ne pas éprouver ce que j'épprouve justement pour lui ? Que cela me conduirai à ma perte ?# se demanda la jeune femme.

Elle se leva enfin et fit les cent pas, revisitant par la même occasion tout le manoir.

# Mais il est le premier, non... le seul à éveiller ces sentiments étranges en moi... le seul à qui je me sois confiée... le seul à qui je fasse confiance... #

- C'est le seul homme pour qui je ressens réellement quelque chose... dit-elle tout haut, dans le silence du manoir.

Brusquement, le silence se mit à l'angoisser, à l'oppresser, sans qu'elle sache pourquoi. En fait, si : elle aurait voulu qu'Amok et elle continuent à parler. Voilà pourquoi elle se sentait oppressée.

Elle s'arrêta : elle était revenue dans la cuisine. Son regard se perdit encore une fois dans les ténèbres qui entouraient le manoir.

Elle secoua la tête.

# Non, je ne peux pas l'imaginer en monstre... ça m'est impossible... Il a été si sympatique avec moi... c'est le premier qui ait bien voulu me parler et apprendre à me connaitre... Il n'est pas dangereux.# pensa encore la jeune famme.

Elle sortit de la cuisine, se dirigea vers l'escalier menant à l'étage et gagna sa chambre. Là, Tinùviel retira sa luxueuse robe et passa une longue chemise de nuit simple, en tissus peu couteux, blanche. Elle écarta les couvertures du lit à baldaquins, souffla la bougie, se coucha et s'endormie.

[Tinùviel]

Tinùviel se reveilla tard dans la journée ; il était près de 16h. Elle se dirigea vers la grande armoire en ébène, ouvrit une des portes, choisit une robe de velours couleur sang avec des dentelles couleur ténèbres. Elle retira sa chemise de nuit et mit la robe, puis passa à ses pieds ses souliers noirs.

Elle ne se sentait pas de continuer son métier ; à présent, cela la révulssait, la répugnait. Maintenant que son âme austère avait goûtté aux sentiments, qui plus est à l'amour, elle ne voulait plus faire ce métier déjà réprouvé par nombre de bonnes gens dans Clantor ; elle ne s'en sentait plus la force. Tinùviel pria pour remercier Amok de lui avoir ouvert les yeux ; ce qui renforça en un sens les sentiments qu'elle éprouvait pour lui. Elle se rappela alors les paroles du vieil homme, la veille et décida qu'elle allumerai la bougie à sa fenêtre, ce soir-là.

Elle descendit, choisit un livre dans la grande bibliothèque située à l'opposé du salon, puis alla s'installer sur le canapé de velours rouge dans ledit salon - là où, la veille, elle avait parlé avec Amok et où il avait bû un thé à la muscade.
Le temps passa et, bientôt, le soleil déclina dans le ciel. Tinùviel se leva, alla chercher un bougie dans la cuisine, la rammena et la posa sur la table basse en attendant de l'allumer.

Trois quarts d'heures plus tard, le jour n'était plus qu'une lueur rougeoyante à l'horison. Tinùviel prit la bougie, l'alluma et la posa dans un chandelier en argent, qu'elle mit sur la fenêtre. Puis elle se rendit compte qu'elle relisait la même phrase du livre depuis près de 2h : "Les dés sont jetés, ne pensons plus au passé, aux moments tristes, mais plutôt aux instant joyeux à venir. Vivons le présent, vivons l'Eternité."...

- C'est vrai... le passé fait mal, il est mieux de ne plus y penser, mais plutôt de se réjouir des instants heureux que le future nous réserve, si peu nombreux soient-ils... le passé est synonime de cicatrices, il nous est impossible de vraiment oublier, mais il est possible de vivre dans le présent, de vivre au jour le jour ; sans plus penser au passé...

Elle corna un peu la page, fit une petite marque à l'encre au début et à la fin de la phrase et posa le livre ouvert sur la table basse.

Puis elle attendit qu'Amok arrive, si jamais il venait... Mais elle chassa bien vite ses doutes ; il viendrait, elle le sentait, elle était confiante.

[Zodiac]

Amok avait été bien occupé cette nuit là.. Tinùviel ne pouvait ignorer les cris.. La ville était en proie à la colère des Homo Novus et des innombrables insectes que guidait Salias.. Le vieillard aurait volontiers continué de massacrer ces faibles, mais une promesse était une promesse.. Il s'était promis de lancer un génocide dans la capitale humaine, il l'avait fait, il s'était promis de revoir Tinùviel le soir c'était ce qu'il était en train de faire.. Couvert de sang et d'organes concassés, il approchait de la résidence en courant et piétinant les gens agonisants.. Hier, il avait eu une idée et un élan de compassion..

Il cogna contre la porte et finit par briser la serrure.. Il renifla l'air après être entré et trouva Tinùviel qui semblait ne pas comprendre se qui se passait au dehors..

"Allons.. Allons.. Ce sont les cris qui te font peur ? Sois débarrassé de tes craintes.. Je suis ici pour te sauver la vie.."

Il s'approcha et lui prit les mains avec douceur..

"Je ne cacherais pas que je suis l'auteur de se qui se passe en ville.. Ce n'est pas une destruction inutile.. J'admet qu'il y a trois phases dans la nature, comprendre, détruire et reconstruire.. Et.. Je ne saurais pas comment ce qui va suivre va te plaire ou te dégouter mais.."

Il soupira..

"Veux-tu me rejoindre et prendre part à une page de l'histoire ? Prendre part à l'évolution ?"

[Tinùviel]

Tinùviel était ébahie par ce qu'Amok venait de lui dire : il avait tués des gens et il était couvert de leur sang et de leurs viscères...

Elle resta pourtant impassible devant le spectacle macabre qui se déroulait au dehors, même si elle ne savait que faire.

- Amok, je... je ne comprends pas... Pourquoi tout cela ? Pourquoi tuer des innocents ? Il n'y a pas d'autre solution ?

Elle parraissait calme mais, à l'intérieur, elle était déboussolée. Certes, elle ne comprenait pas la raison de tout cela, mais ses sentiments pour Amok s'en trouvaient inchangés.

- Amok, je suis certaine de ce que j'éprouve pour toi, maintenant. Tu as certes tué des gens mais, si tu es venu ce soir, c'est que tu dois tout de même avoir des sentiments. Je ne sais pas quoi faire Amok. Je veux rester avec toi, mais je crains de me faire blesser, ou pire... Et je ne veux pas que l'on te fasse du mal, malgré ce que as fais.

Tinùviel regarda Amok dans les yeux.

- Tu es le premier pour qui je ressens de tels sentiments, alors... Je viens avec toi, Amok. Quoi qu'il m'en coûte au final.

[Zodiac]

Le vieillard écarquilla les yeux.. Etait-il possible que Tinùviel eut fait fi de son apparence ? Son regard ne trahissait rien.. Elle disait la vérité.. Après tant d'années.. Lui qui avait évincé de sa pensée le désir de trouver une compagne se ralluma..

"L'expérience m'a apprise que rien qui vaille la peine ne se fait sans morts.. Regarde, combien de gens sont morts dans la construction de cette ville magnifique ? Combien sont morts pour des idées qui valaient la peine de se battre ? Je pense pouvoir te l'avouer à toi seule.. Je suis au fond de moi déchiré par mes actes.. Mais je sais que c'est la seule solution, je dois mettre de coté mes sentiments pour penser au bien-être de tous.. Tu comprend ?"

Il réajusta son épaulette et serra les mains de la jeune femme entre ses doigts crochus, pourtant l'étreinte était douce.. Amok cessa de se courber, du haut de ses deux mètres, il eut l'air plus jeune et plus vigoureux que jamais.. Plongeant son regard brillant dans celui de Tinùviel il tenta de la rassurer..

"Je promet qu'il ne t'arrivera rien ce soir.. Aussi longtemps que je vivrais.. Si les choses se passent mal pour moi.. Tu seras protégée aussi longtemps que tu portera ce collier.."

Il lui passa au cou un de ses précieux colliers en lacet de cuir, retenant au bout une paire de bagues en or.. Ces alliances étaient pour lui plus que précieuses.. Elles avait été achetés pour lui et son amour perdu.. Il hésitait à la prendre dans ses bras.. Comment le prendrait-elle ?

[Tinùviel]

Tinùviel regarda Amok ; elle n'avait pas peur de lui, au contraire, elle comprennait parfaitement ses motivations.

- Oui, je comprends, Amok.

Quand Amok lui passa le colier de cuir orné de deux bagues en or autour du cou, elle se fit la promesse de ne jamais s'en séparer. Jamais.

Tinùviel sourit à Amok.

- Merci.

Alors, elle le prit dans ses bras et le serra contre elle, se fichant éperdumant du sang et des viscères dont il était couvert. Malgré elle, quelques larmes roulèrent sur ses joues, mais ce n'était ni des larmes de tristesse, ni des larmes de rage ou de haine, comme elle en verssait habituellement ; c'était des larmes de gratitudes.

- Merci Amok. Même si beaucoup voient en toi un monstre, pour moi, tu n'en es pas un.

Elle s'écarta un peu et sourit encore ; une grosse tache rouge sombre marquait sa joue gauche et un petit morceau d'organe s'y acrochait, là où sa peau claire avait touché Amok.

- Je suis née dans la clarté de la Lumière mais j'ai choisis l'obscurité des Ténèbres... Ne t'en fais pas... Tu ne seras plus jamais seul. Jamais. Je serrai avec toi pour l'Eternité, Amok. C'est promis.

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